p. 11 – 18

Christian BELIN

Éditorial

PIERRE LE MOYNE (1602-1671) : L’ÉCRITURE D’UN JÉSUITE
PIERRE LE MOYNE (1602–1671) : THE WRITING OF A JESUIT

p. 21 – 34

Érotie et l’amour pur

Benedetta PAPÀSOGLI

Le paradoxe de l’amour pur s’exprime par des « configurations » mythiques plus que par des élaborations conceptuelles. Les Peintures morales du père Le Moyne, avec leurs multiples définitions de l’amour et surtout avec leur Érotie, leur « Île de pureté », leur rêverie édénique et leurs galeries d’exemples tragiques, offrent un apport original au laboratoire, profane et sacré, où tout au long du XVIIe siècle l’idée d’amour pur est forgée et mise à l’épreuve.

Érotie and pure love

The paradox of pure love is expressed in mythical “configurations” rather than in conceptual schemata. The Peintures morales of Father Le Moyne, with their multiple definitions of love and especially with their Érotie, their “Island of Purity”, their Edenic reverie, and their galleries of tragic examples, offer an original contribution to the profane and sacred testing ground where, throughout the seventeenth century, the idea of pure love was forged and scrutinized.

p. 35 – 50

Barbara PIQUÉ

Une stratégie polémique ?

Que La Gallerie des femmes fortes (1647) du père Le Moyne compte la moitié d’Infidèles et que sept d’entre elles se soient donné la mort ou aient tenté de le faire n’est sans doute pas le fait du hasard. Cet article montre que l’auteur entendait ainsi participer à la controverse sur les vertus des païens mettant aux prises jansénistes, jésuites et libertins en cette décennie 1640 et s’interroge sur les stratégies mises en œuvre par le jésuite pour « excuser » la mort volontaire de ses héroïnes.

The ‘beautiful death’ of pagan women. A polemical strategy?

It is surely not by chance that half of the women in Father Le Moyne’s La Gallerie des femmes fortes (1647) are infidels and that seven of them took their own lives or attempted to do so. This article shows that the author sought to take part in the controversy on the virtues of the pagans that pitted Jansenists, Jesuits, and libertines against each other in the 1640s. It also explores the strategies implemented by the Jesuit to “excuse” the voluntary death of his heroines.

p. 51 – 76

Florent LIBRAL

Rhétorique du clair-obscur et émergence du sujet
dans Les Peintures morales de Pierre Le Moyne (1640 et 1643)

L’éloquence jésuite dite « des peintures » est tributaire d’une foisonnante imagerie optique, qu’il s’agisse de lumière, de miroirs, d’anamorphoses… L’article propose d’interroger le versant ténébriste de ce dispositif. Les Peintures morales et Les Hymnes montrent que le clair-obscur joue un rôle central dans la sophistique sacrée de Pierre Le Moyne, en suggérant la rencontre de la clarté divine avec un sujet humain aveuglé par le péché et la finitude, mais capable de la recevoir.

‘Je ne sçay quoy d’éclattant et de noir’. The rhetoric of chiaroscuro
and the emergence of the subject in Pierre Le Moyne’s Les Peintures morales

The Jesuit eloquence referred to as “painterly” is dependent on a rich optical imagery: light, mirrors, anamorphosis… This article aims to study the tenebrist side of these visual metaphors. Les Peintures morales and Les Hymnes show that chiaroscuro plays a central role in Pierre Le Moyne’s sacred sophistry, by suggesting the encounter of divine clarity with a human subject blinded by sin and finitude, but capable of receiving it.

p. 77 – 100

Derval CONROY

Les traductions de La Gallerie des femmes fortes (1647) de Pierre Le Moyne

Analysant divers péritextes des traductions en italien (1701) et en espagnol (1702) de La Gallerie des femmes fortes, l’article examine comment ce volume fit l’objet d’appropriations dans d’autres conjonctures politiques et socioculturelles que celles de sa création originelle. Surtout, une analyse des prologues met en relief l’importance des péritextes dans la création de l’objet-livre et lors de sa réception. La traduction péruvienne, souvent considérée comme perdue, est particulièrement révélatrice.

The appropriations of a political machine. The translations of Pierre Le Moyne’s Gallerie des femmes fortes (1647)

Analyzing the various peritexts of the Italian (1701) and Spanish (1702) trans-
lations of
La Gallerie des femmes fortes, this article examines how this volume was
appropriated in political and sociocultural contexts that differed from that surrounding its composition. Above all, analysis of the prologues highlights the importance of peritexts in the creation of the book-as-object and its reception. The Peruvian translation, often believed lost, is especially revealing.

p. 101 – 120

La Jérusalem délivrée du Tasse et le Saint Louis de Pierre Le Moyne

Lucien WAGNER

Imitation et poétique de l’écart

Les poèmes héroïques français des années 1650 ont longtemps été considérés comme de mauvais pastiches des grands modèles épiques. La comparaison du Saint Louis du P. Le Moyne et de la Jérusalem délivrée du Tasse met ainsi en évidence un parallélisme patent entre ces deux épopées de croisade. Mais l’originalité du Saint Louis devient sensible dès qu’on prend en compte les écarts, plus ou moins importants, qu’il produit constamment par rapport à ce modèle et à son système de valeurs.

Tasso’s Jerusalem Delivered and Pierre Le Moyne’s Saint Louis. Imitation and the poetics of deviation

The French heroic poems of the 1650s have long been deemed poor pastiches of the great epic models. A comparison of Pierre Le Moyne’s Saint Louis with Tasso’s Jerusalem Delivered highlights a clear parallel between these two crusade epics. But the originality of Saint Louis becomes apparent as soon as one takes into account the deviations of varying import that it constantly produces in relation to this model and its value system.

Varia

Le Traité de la comédie a toujours bénéficié de la part de la critique d’une étonnante mansuétude. Les raisonnements de Nicole sont validés sans exa- men, ses arguments reçus sans discussion, son point de vue a priori estimé pertinent. À travers le prisme d’une question particulière, celle du théâtre de dévotion, cet article propose une relecture critique du traité qui en discerne les stratégies logiques, les références esthétiques, les fondements éthiques et surtout les postulats théologiques.

Is Pierre Nicole’s Traité de la comédie a comedy?

Critics have always been astonishingly lenient toward the Traité de la comédie. Nicole’s reasoning is endorsed without reflection, his arguments received without dis- cussion, his point of view automatically presumed to be relevant. Through the lens of devotional theater, this article proposes a critical rereading of the treatise, identifying its logical strategies, aesthetic references, ethical foundations, and, above all, its theo- logical postulates.

p. 145 – 161

Simone DE REYFF

La chaire et le barreau au miroir de la conversation familière

Premier essai d’un jeune avocat féru de belles-lettres, les Entretiens sur l’éloquence de la chaire et du barreau de Gabriel Guéret ne font que reprendre un débat largement diffusé dans la culture contemporaine. Si la matière n’en est pas nouvelle, l’intérêt de ce dialogue réside dans sa manière. Déplacée dans le registre de la conversation mondaine, la concurrence entre gens de métier se mue en dispute aimable où s’affrontent des partenaires complices.

‘Nous ne dépendons ni du sable ni de la formule’. The pulpit and the bar as reflected in familiar conversation

The first essay of a young lawyer enamored of belles-lettres, the Entretiens sur l’éloquence de la chaire et du barreau of Gabriel Guéret simply takes up a debate that was widespread at the time. While the subject may not be new, the pertinence of this dialogue lies in its mode. Shifted to the register of worldly conversation, competition between professions turns into a friendly dispute between close partners.

p. 163 – 196

Prédicateur, panégyriste, précepteur et historien, Bossuet le fut, mais pas seulement. Doté d’une culture et d’une personnalité polyvalentes, comme tous les autres héritiers de l’humanisme philologique à son époque, il fut aussi évêque, érudit attentif et exégète. Dans ce Supplément, il prend part aux débats exégétiques des savants de son temps ; il y prend position contre un érudit néerlandais influent, Hugo Grotius, exégète arminien et, selon Bossuet ici, socinien.

The Supplenda in Psalmos, or the Supplement to the Dissertation on the Psalms by Jacques-Bénigne Bossuet (I), with an introduction to ‘Bossuet’s exegesis and Hugo Grotius

Bossuet was not only a preacher, a panegyrist, a royal tutor and a historian, but being such a versatile and cultured author, he was also a bishop, an erudite scholar and an exegete. In his Supplenda in Psalmos, he takes part in exegetical debates which involve many scholars of his time. He takes a stand against an influential Flemish scholar, Hugo Grotius, imbued with Arminian exegesis, and whom Bossuet accuses here of the heresy of Socinianism.

p. 199 – 213

Jacques-Bénigne Bossuet, Maximes et réflexions sur la comédie, suivis du Traité de la concupiscence, textes établis, présentés et annotés par Patricia Touboul, Paris, Honoré Champion, coll. « Sources classiques », 2020, 706 p. (Goulven Oiry)

Laurent Susini, L’Insinuation convertie. Pascal, Bossuet, Fénelon. La colombe et le serpent, Paris, Classiques Garnier, coll. « L’univers rhétorique », 2019, 458 p. (Nicolas Pelleton)

Vittorio Frajese, Une histoire homosexuelle. Paolo Sarpi et la recherche de l’individu à Venise au XVIIe siècle, Paris, Classiques Garnier, coll. « Lire le XVIIe siècle », 2022, 132 p. (Marie Viallon)

Le Discours mystique entre Moyen Âge et première modernité, t. III, L’institution à l’épreuve, dir. Véronique Ferrer, Marie-Christine Gomez-Géraud et Jean-René Valette, Paris, Honoré Champion, coll. « Mystica » (16), 2021, 521 p.  (Clément Van Hamme)

p. 215 – 219

des travaux relatifs à la spiritualité du XVIIe siècle